Contexte scientifique et projet de recherche
Accélérer la transition agroécologique pour diminuer la vulnérabilité des systèmes agricoles et accroître leur résilience face aux changements globaux, tout en répondant aux enjeux économiques et sociaux, constituent un objectif majeur pour l’avenir. Cette transition nécessite de mobiliser des connaissances et des savoir-faire sur des fronts de sciences encore insuffisamment explorés. Parmi ces fronts de sciences, la compréhension des mécanismes d’interaction qui régissent les relations entre la plante et les agents pathogènes fongiques, est de première importance pour accomplir cette transition. Ces connaissances constituent le socle à partir duquel pourront être développées les innovations de rupture en biocontrôle.
Une voie prometteuse consiste à perturber le dialogue moléculaire entre les agents pathogènes et la plante au travers de l’utilisation de petits ARN. Les petits ARN échangés entre les champignons et les plantes lors d'une infection, peuvent induire l'inactivation de la transcription des gènes de la plante comme des gènes de résistance, tandis que les plantes peuvent produire des ARNs pour cibler les gènes de virulence chez les agents pathogènes. Ces mécanismes d’échange d’ARN peuvent être exploités pour générer des solutions de biocontrôle basées sur l’application d’ARN double brin (ARNdb) ciblant des gènes de sensibilité chez les plantes ou des gènes essentiels chez les agents pathogènes fongiques.
Renforcer l’immunité et réduire la vulnérabilité des plantes à des phases clefs de leur développement est une autre stratégie. Elle nécessite une bonne connaissance des mécanismes de régulation des interactions hôtes-pathogènes pour gérer leur plasticité vis-à-vis des contraintes environnementales. Il est ainsi possible d’étudier l’effet de microorganismes de biocontrôle ou de molécules élicitrices, qu’elles soient des stimulateurs de défense des plantes (SDP) ou des biostimulants (BS). Ces phytostimulants peuvent agir sur les interactions hôtes-pathogènes et préparer la plante à répondre à des stress multiples (phénomène de « priming »).
La vigne est un modèle biologique original du fait de sa nature pérenne, de sa grande diversité génétique, et des multiples contraintes abiotiques et biotiques auxquelles elle doit faire face. La vigne est attaquée par de nombreux agents pathogènes dont certains peuvent anéantir la récolte s’ils ne sont pas contrôlés : il s’agit principalement de l’agent du mildiou (oomycète) et de champignons pathogènes tels que l’oïdium, le black-rot, botrytis, et les complexes fongiques liés aux maladies de dépérissement. Chacun de ces agents pathogènes a des stratégies d’attaque et des dépendances spécifiques vis-à-vis de la plante hôte et de l’environnement. Ils sont de nature polycyclique avec une multiplication exponentielle de l’inoculum susceptible de créer des dégâts à chaque cycle de reproduction.
Aujourd’hui la viticulture doit répondre simultanément aux deux enjeux majeurs que sont la sortie des pesticides et l’adaptation au changement climatique. Dans ce contexte, il est essentiel de produire les connaissances fondamentales sur les interactions entre la vigne et les composantes biotiques et abiotiques de l’environnement pour mettre au point des solutions innovantes permettant de répondre à ces enjeux tout en maintenant la production de raisins à haute valeur ajoutée.
L’UMR EGFV mobilise des approches moléculaires et pluridisciplinaires pour analyser les mécanismes qui régissent les interactions de la vigne avec son environnement. Spécialisée dans l’étude des facteurs abiotiques, cette unité est composée de scientifiques ayant une expérience reconnue dans l’étude des interactions hôte/microorganismes (pathogènes ou non). Elle met à disposition ce savoir-faire et expertise scientifique au service d’autres laboratoires qui s’intéressent aux interactions avec les facteurs biotiques (SAVE-Bordeaux, Agroécologie-Dijon). Les projets qu’elle développe au quotidien ciblent des gènes impliqués dans la signalisation et la régulation de l’expression des gènes (facteurs de transcription, petits ARNs, mécanismes épigénétiques),
Des projets de recherche sur le biocontrôle (réponse de la vigne à la phytostimulation en conditions de stress biotiques et abiotiques ; RNAi ciblant la signalisation et la régulation de l’expression de gènes) sont conduits dans le cadre du GPR « Bordeaux Plant Sciences » et PPR Vitae. Les scientifiques de l’UMR EGFV maîtrisent les outils nécessaires à ce type d’étude et disposent des infrastructures pour conduire ces études, en local ou en partenariat avec d’autres unités (SAVE).
Mission de l’enseignant(e)-chercheur recruté(e)
Dans ce contexte, le.la maître de conférences mènera des recherches portant sur l’une et/ou l’autre des approches pré-citées (Immunité végétale, petits ARN). Il pourra chercher à identifier si des mécanismes d’extinction génique peuvent contribuer à expliquer (i) les interactions entre les champignons pathogènes et la plante hôte, ou (ii) l’expression des symptômes en fonction des conditions environnementales. La personne recrutée caractérisera les petits ARN produits par différents champignons et déterminera si ces petits ARN peuvent potentiellement éteindre l’expression des gènes de résistance de l'hôte. Si les ARNdb peuvent être utilisés pour induire l’inactivation des gènes chez les champignons pathogènes étudiés, les gènes candidats seront réduits au silence par l’application d’ARNdb à des fins de caractérisation fonctionnelle. Pour ses travaux, il.elle utilisera les bases de données disponibles de séquences du génome de ces champignons et ciblera les gènes connus pour intervenir dans ces mécanismes d’extinction génique.
Pour l’étude des interactions hôte-pathogène sous l’effet des éliciteurs des réactions de défense, il.elle pourra s’intéresser à l’identification des évènements moléculaires clés modifiés. Il.elle cherchera à identifier si il existe des mécanismes centraux à plusieurs pathosystèmes, éliciteurs et combinaisons de facteurs environnementaux. L’étude de hubs de régulation seront privilégiés pour des études ultérieures et leur mobilisation pour la mise en œuvre pratique du biocontôle .
Pour mener à bien ses recherches, le.la maître de conférences pourra s’appuyer sur les compétences en physiologie moléculaire, épigénétique et bioinformatique présentes de l’UMR EGFV et en phytopathologie et immunité végétale de l’UMR SAVE et des autres unités du centre INRAE. Il.elle pourra mobiliser les laboratoires de biologie moléculaire de l’unité et aura accès aux plateformes et installations du campus INRAE de Nouvelle Aquitaine Bordeaux. Cette mission répond aux préoccupations socio-économiques régionales et nationales, telles qu’elles s’expriment dans le projet « VitiREV », le PPR VITAE et du plan national de lutte contre les dépérissements de la vigne (PNDV), autant de programmes de recherche dans lesquels l’UMR EGFV est partenaire. Elles s’inscrivent également dans les priorités du GPR « Bordeaux Plant Sciences » dans lequel les chercheurs des UMR EGFV et SAVE sont fortement impliqués, notamment dans l’axe 3 « contrôle du fonctionnement de la plante, de sa culture et de ses produits récoltés, en lien avec les perturbations environnementales et les demandes sociétales ».
Profil Recherche de l’enseignant(e)-chercheur
le.la maître de conférences devra avoir une expérience reconnue dans le domaine de la phytopathologie et des interactions moléculaires hôte/pathogène. Il.elle devra avoir une bonne connaissance de la diversité des agents phytopathogènes fongiques. Il.elle aura pour mission de mettre en œuvre des recherches sur les mécanismes moléculaires du biocontrôle des maladies de la vigne.
La personne recrutée devra s’impliquer dans l’encadrement de doctorants, et avoir une forte capacité à travailler en équipe. Il.elle travaillera en étroite collaboration avec les chercheurs de l’UMR Santé et Agroécologie du Vignoble (SAVE), spécialistes de l’épidémiologie végétale et du biocontrôle de la vigne. La personne recrutée devra s’impliquer dans l’encadrement de doctorants, et avoir une forte capacité à travailler en équipe. Il.elle devra être en mesure de développer des collaborations fortes au sein du département ‘Sciences de l’Environnement’, ainsi qu’au niveau national et international sur sa thématique.
Champs de recherche
- Phytopathologie, Mycologie
- Génétique/Génomique, Biochimie, Biologie moléculaire, Interactions hôte-pathogènes, Biologie des petits ARN
Impact scientifique attendu
- Émergence de nouveaux concepts sur les interactions moléculaires entre la vigne et les agents pathogène fongiques ;
- Renforcement de la reconnaissance et des compétences dans le domaine de l’immunité végétale ;
- Innovation basée sur les petits ARN comme méthode de biocontrôle en viticulture ;
Contact pour la recherche : Dr Sarah Cookson (sarah.cookson@inrae.fr), Nathalie Ollat (nathalie.ollat@inrae.fr)
Enseignants-chercheurs de référence : Pr Eric Gomès (eric.gomes@inrae.fr)/ Pr Philippe Gallusci (philippe.gallusci@inrae.fr)